D’un côté le dérèglement climatique, qui provoque des sécheresses et des forts épisodes de chaleur, faisant souffrir les écosystèmes. Le troisième plus grand puits de carbone de notre pays a perdu 50% de sa capacité à absorber du carbone en 15 ans. De l’autre, la pression humaine qui augmente ; le bois étant considéré comme un matériau écologique, les pratiques destructrices se multiplient en forêt pour répondre à la demande croissante. La récolte totale de bois annuelle est considérée comme inférieure à l’accroissement biologique de nos écosystèmes forestiers, encourageant les institutions à augmenter les objectifs de rendement de nos forêts. Le dérèglement climatique devient alors une excuse pour raser des forêts naturelles et les remplacer par des monocultures d'essences plus "adaptées".

75% de la forêt française est privée ; soit 3,3 millions de propriétaires (ou sylviculteurs), dont la presque totalité (99%) n’est pas dans l’obligation de produire un document de gestion durable (PSG), car possédant moins de 20 Ha de surface de forêt. Cette réalité entraîne une hétérogénéisation des pratiques sylvicoles (s’il y en a) sur la plupart des massifs forestiers français, pouvant provoquer des déséquilibres dans les écosystèmes. Remembrer des parcelles - notamment via la création de GFCE, permettrait d’y pratiquer une gestion durable homogène et au bénéfice de la biodiversité. 57% des propriétaires forestiers sont des retraité(e)s, le marché des forêts va s’ouvrir dans les prochaines années, et il est important qu’elles reviennent à des acteurs qui sauront la respecter.

La forêt a toujours nourri de nombreux fantasmes, et ce phénomène n’est pas prêt de s'arrêter à mesure que la population s’urbanise et se sédentarise. L’idée d’une vérité écologique unique pour le futur des forêts françaises, qui serait de la mettre sous cloche et d’y extraire l’humanité, empêche les citoyens et citoyennes de comprendre la complexité et la multiplicité des enjeux à des échelles locales. Les forêts seront sauvées par une écologie de terrain, portée par des forestiers respectueux des écosystèmes et où l’homme a sa place : il est possible de produire du bois tout en préservant les écosystèmes forestiers et améliorer leur résilience.

Nous vivons la sixième extinction de masse et 80% de la biodiversité terrestre se trouve en forêt. Si les enjeux liés à l’évolution des pratiques de gestion forestières sont nombreux et complexes, il faut garder à l’esprit que la problématique principale reste de retrouver notre capacité à produire du bois à large échelle tout en respectant les écosystèmes forestiers et la biodiversité qu’ils abritent. Soit une gestion vertueuse des forêts, où l’homme y trouverait sa place, en symbiose avec son environnement. Nous ne pouvons prétendre lutter contre le dérèglement climatique, sans préserver les services rendus par nos différents écosystèmes, dont la forêt.